Au Maroc, la découverte inédite du plus ancien Acheuléen de l’Afrique du Nord à Casablanca le 28 juillet dernier par des experts en archéologie, fait de ce Royaume une destination des plus prisées des chercheurs des trésors enfouis de l’Histoire, particulièrement ceux en quête d’une connaissance encore plus précise des origines des êtres humains.
La découverte de l’acheuléen, le site le plus ancien de fabrication de haches datant de l’âge de la pierre en Afrique du Nord s’inscrit dans le cadre du programme « Préhistoire de Casablanca ».
Selon une équipe de recherche franco-italo-marocaine, l’Acheuléen daterait d’il y a 1,3 million d’années. Un réel rebond chronologique pour les archéologues, qui estimaient le début de la culture acheuléenne, associée à un ancêtre humain, l’Homo erectus à environ 700.000 ans dans la sous-région.
“Cette découverte au fait c’est une publication très importante dans la revue scientifique report-nature sur ce qu’on appelle le cadre chronostratigraphique de haute résolution sur l’acheuléen en Afrique du Nord, et cette publication nous donne l’âge d’un million 300.000 comme référence chronologique la plus ancienne pour cet acheuléen en Afrique du Nord” a soutenu l’archéologue marocain Abderrahim Mohib.
Après avoir défini l’Acheuléen en tant qu’une culture matérielle qui caractérise le Paléolithique ancien, l’expert marocain a passé en revue les vestiges archéologiques qui ont été découverts, notamment les bifaces (triédriques, hachereaux…) ainsi que d’autres objets taillés qui entrent dans l’outillage ou l’industrie lithique de ces Acheuléens.
M. Mohib a, par la suite, énuméré les étapes par lesquelles les archéologues supervisent les opérations des fouilles passant par l’enregistrement de « la pièce », (carte d’identité) jusqu’à sa conservation soit dans les laboratoires ou dans les institutions concernées en l’occurrence l’INSAP.
« Lors des fouilles, on a aussi découvert les restes fossiles d’animaux notamment de l’hippopotame, d’éléphants, de la gazelle, du zèbre, et une certaine espèce de cochon, ainsi que d’autre types d’animaux comme les rongeurs, grâce à l’association de plusieurs chercheurs (Maroc, France et d’Italie) et l’utilisation d’autres disciplines scientifiques magnétostratigraphiques » a-t-il affirmé.
L’exploration a eu lieu sur le célèbre site de la carrière Thomas Quarry I, connu pour la découverte en 1969 d’une demi-mandibule humaine dans une grotte. 17 chercheurs marocains, français et italiens sont impliqués dans cette nouvelle trouvaille qui permet d’attester de la plus ancienne présence d’êtres humains au Maroc et hisse le pays au rang des assemblages acheuléens les plus riches d’Afrique.
“Au niveau de l’Afrique de l’Est il est âgé de 1,8, en Afrique du Sud il est âgé de 1,6 et maintenant la troisième position est occupée par notre pays en ce sens qu’avec un million 300 000 ans nous situons à l’échelle universelle à la troisième position comme date disant comme date ancienne et c’est la plus ancienne à l’échelle de la région de l’Afrique du Nord” a affirmé Abdelouahed Ben Ncer, directeur de l’INSAP (Institut National d’Archéologie et des Sciences du Patrimoine).
Alors qu’il existe encore peu de données sur la capacité de l’homme préhistorique à concevoir la forme de l’outil qu’il souhaite, cette dernière découverte constitue une avancée historique majeure pour les chercheurs marocains et le programme “Préhistoire de Casablanca”.
La valeur de la préhistoire marocaine a ainsi pris un tournant majeur avec la découverte en 2017 des plus anciens Homo sapiens au monde sous le sol du Royaume. Maroc. Avec la trouvaille de l’Acheuléen, c’est un nouveau pas géant vers la démystification de certains secrets jusque-là impénétrables, voire une ébauche pour la réécriture d’une partie de l’histoire de l’humanité.
Ces intéressantes découvertes replacent encore une fois la région de Casablanca, en particulier, et le Maroc, en général, en tête des études et recherches sur l’origine de l’Homme, l’évolution de ses techniques, de ses cultures, ses déplacements entre des différentes régions de l’Afrique puis vers l’Europe et l’Asie, a expliqué le chercheur en préhistoire Abderrahim Mohib.
« Ces découvertes contribuent certainement à la résolution, sinon à apporter des éléments nouveaux en ce qui concerne toutes ces questions », a souligné M. Mohib.
D’autres recherches en vue
Selon le chercheur marocain, il y a des recherches en perspective, notamment le programme de recherche préhistoire de Casablanca, et qui ne concerne pas seulement le site de la carrière Thomas 1, mais des sites limitrophes comme la grotte d’hominidés (600.000 et 700.000 années) où on a découvert des fossiles humains qui sont les plus anciens au Maroc. En plus, il y a la grotte des Rhoniséros située à la carrière Oulad Hamida, qui est aussi un site acheuléen daté de 70 7h0.000 ans.
A part l’intérêt scientifique, poursuit M. Mohib, cette découverte place le Maroc en tant qu’une zone de l’Afrique du Nord incontournable pour la connaissance et l’étude de ces premiers peuplements et de leurs origines et de leurs évolutions et leurs migrations.
« En termes de valorisation des découvertes récentes, le ministère de tutelle est en train de réaliser un projet de valorisation sur deux sites très importants, à savoir le parc de préhistoire de Sidi Abderrahmane Nord et le Centre d’interprétation du gisement de la carrière Thomas », a-t-il souligné.
Il existe aussi un autre site à l’Est de Casablanca, en l’occurrence Ahl Loghlam qui est un site paléontologique regorgeant des restes de fossiles animaux et qui sont datés de 2,5 millions ans, a-t-il relevé, précisant qu’il y a le fameux gisement de Sidi Abderrahamne qui a livré des restes humains en 1955 et classé patrimoine national 1951.
Un parc préhistorique en projet au Maroc
D’après le spécialiste, le parc de préhistoire de Sidi Abderrahmane à Casablanca sera le premier parc de préhistoire en Afrique du Nord où il sera question de raconter toute cette histoire de la préhistoire de Casablanca et de montrer la richesse du territoire national aux citoyens marocains, aux touristes étrangers et aux scientifiques.
Le site de la découverte en question a été identifié en 1985 dont la première fouille a été effectuée en 1988 et depuis, jusqu’à aujourd’hui les recherches se poursuivent (fouilles, études, échantillonnage..), a-t-il fait savoir, ajoutant que c’est tout un processus très long pour mettre en valeur ce niveau (L) archéologique de la carrière Thomas I.
«La découverte récente au site L de la carrière Thomas I Ouest de Casablanca, n’est pas un effet du hasard, mais c’est le fruit d’un cursus très long de recherches qui se passe dans le cadre d’un programme maroco-français lancé depuis 1978 », a tenu à préciser l’archéologue marocain qui a codirigé les travaux de recherches dans le site précité.