Généralement habitués à des conditions de vie extrêmes en se déplaçant au gré des saisons, les nomades marocains subissent aujourd’hui la rude épreuve du dérèglement climatique.
Le nomadisme est un mode de vie ancestral où des familles entières se déplacent au gré des saisons avec leur bétail. Mais cette année semble la pire de toute au Maroc depuis plus de quatre décennies, car les nomades confrontés à une sécheresse accrue voient leur mode de vie disparaître.
“L’eau se fait rare. Les températures augmentent, la sécheresse sévit sans qu’on puisse faire grand-chose. Nous sommes épuisés”, a exclamé une famille nomade.
Ayant passé des siècles à parcourir le désert avec leurs pâtures, les nomades sont sur le point de perdre leurs usages traditionnels.
Selon France info, ce style de vie concerne aujourd’hui moins de 5 000 personnes, se déplaçant dans le grand sud marocain, contre 25 000 en 2014 et 70 000 dix ans plus tôt.
Driss Skount, représentant des nomades des Aït Aïssa Izem a affirmé que le changement climatique est à l’origine de cette situation.
« Il n’y a plus de chutes de neige comme avant, ce qui permettait de saturer les réserves d’eau souterraines. Tout s’est asséché, y compris les rivières et les puits. Les pauvres nomades sont coincés. Il ne leur reste qu’un seul point d’eau ici. Si la sécheresse frappe cet endroit aussi, ils n’auront rien » ; a-t-il expliqué.
En dehors du climat, les nomades font également face à l’hostilité de certains villageois, qui ne veulent pas qu’ils campent dans leur région.
« Nous voudrions aller dans d’autres régions mais les gens nous chassent et nous disent de rentrer chez nous, ils ne nous laissent pas nous installer ailleurs, mais notre “chez nous” est frappé par la sécheresse » ; a déclaré l’un des nomades en difficulté.
Pour d’autres, la privatisation des terres et d’investissement agricole, comme le plan “Maroc vert” (programme définissant la politique agricole du Royaume du Maroc, lancé en 2008 par le ministère de l’Agriculture) n’a certainement pas arrangé les choses.
« C’est le plan “Maroc vert” qui est à l’origine de tout cela, car il a permis aux riches de construire des fermes, de creuser de nouveaux puits et de fermer les anciens appartenant aux nomades. Ils ont pillé les richesses du pays, ces gens qui ont des maisons, des villas, ils ont tout pris, s’ils pouvaient prendre la mer, ils le feraient. Et ils ont laissé mourir les gens qui vivent dehors » ; a dénoncé Haddou Oudach, nomade.
Selon le ministère de l’Agriculture, la situation devrait empirer progressivement d’ici 2050 sous l’effet de la diminution de la pluviométrie de 11 % et d’une augmentation des températures moyennes de 1,3 %.
« Les nomades ont toujours été considérés comme un thermomètre des changements climatiques. Si eux, qui vivent dans des conditions extrêmes, n’arrivent plus à résister à l’intensité du réchauffement, c’est que l’heure est grave » ; a souligné l’anthropologue Ahmed Skounti.
Si cette situation persiste, les nomades seront obligés d’adopter dans les années à venir la sédentarisation comme nouveau mode de vie.
« Etre nomade, ce n’est plus comme avant. Je continue à l’être par contrainte car mes parents très âgés refusent de vivre en ville » ; a affirmé Saïd Ouhada, nomade ayant installé en ville sa femme et ses enfants pour leur scolarité.
Il faut souligner que face aux difficultés, la vie nomade ne semble plus séduire les jeunes qui rêvent de sédentarité.
Houda Ouchaâli, jeune fille de 19 ans, qui cherche à suivre une formation professionnelle après avoir quitté le lycée a avoué ne pas aimer ce mode de vie, car elle ne supporte plus de voir ses parents souffrir et se battre pour survivre.
Il est clair que la nouvelle génération veuille fermer le chapitre du nomadisme et se conformer à la vie moderne.