Diary Sow va bien. La jeune Sénégalaise étudiant à Paris, dont la disparition a mis son pays en émoi, dit avoir pris “une petite pause pour retrouver ses esprits”, dans des échanges publiés jeudi 21 janvier par un proche.
L’étudiante de 20 ans, inscrite en classe préparatoire au prestigieux lycée parisien Louis-Le-Grand, a donné de ses nouvelles à un proche qui a relayé ses propos ce 21 janvier. Elle affirme avoir cherché une sorte de “répit salutaire” sans pouvoir en expliquer la raison et se dit “désolée” de l’émotion que sa disparition a causée.
Diary Sow est saine et sauve, assurent désormais les enquêteurs français. Mais la jeune femme, qui a fugué au lieu de retrouver les bancs de sa classe préparatoire de l’excellent lycée Louis-le-Grand à Paris, refuse de dire où elle se trouve. Alors, avec le soulagement, viennent les interrogations sur les raisons qui ont poussé cette étudiante sénégalaise à fuguer; et la pression qui pèse sur les étudiants étrangers.
Les mots rendus publics par le ministre sénégalais de l’Eau, Serigne Mbaye Thiam, qui a pris l’étudiante sous son aile, sont la première manifestation de vie fiable et publique de sa part depuis sa disparition le 4 janvier.
Mobilisée dès l’annonce de la disparition de la jeune femme, la Toile sénégalaise attend une explication rationnelle de la part de Diary Sow. Il se pourrait bien que la brillante étudiante ait souhaité s’écarter du chemin tout tracé sur lequel elle était engagée depuis son plus jeune âge. Un pas de côté pour celle qui a été sacrée “meilleure élève” du Sénégal en 2018 et en 2019 et qui est déjà l’auteure d’un roman, “Sous le visage d’un ange” .
L’étrange parallèle dressé donne presque l’impression d’une fugue préméditée, écrite et préparée depuis des mois. Mais, au-delà, la question de la détresse psychologique engendrée par la peur de décevoir des étudiants à l’étranger ne doit pas être négligée. Ils ne parviennent à intégrer les meilleurs établissements occidentaux qu’après avoir passé de nombreux concours et ils incarnent ensuite l’espoir de tout un pays.
La presse sénégalaise a d’ailleurs relevé une similitude troublante entre Diary Sow et le personnage de fiction dont elle dresse le portrait dans son livre, Allyn, une jeune fille ambitieuse et complexe :
“Constamment à la quête d’une liberté qui semble la fuir, elle ne cessera de fuguer”, résume le journal Seneplus.
Alors que les internautes sénégalais exigent des explications, certains craignent les conséquences que pourrait engendrer cette pression supplémentaire sur les épaules de la jeune femme, comme l’a rappelé l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye. Il estime que faire de Diary Sow “le porte-drapeau d’un pays à son âge était peut-être excessif, lorsque, éloignée de son cocon familial, l’assistance adéquate et nécessaire lui a sans doute fait parfois défaut.”
Elle brise le silence pour la première fois. Avec son accord et l’autorisation de sa famille” rapporte, Serigne Mbaye Thiam, en dévoilant le contenu de la lettre.
“Bonjour tonton. Je tiens à préciser que je t’écris aussi librement que je suis partie. J’ai laissé assez d’indices derrière moi pour qu’on sache que je partais de mon plein gré. Je ne me cache pas. Je ne fuis pas. Considère cela comme une sorte de répit salutaire dans ma vie (…)”.
“Si je ne m’étais pas manifestée jusqu’à présent, c’est pour la simple raison que j’étais dans l’impossibilité de le faire (….)”.
“Je ne suis victime d’aucune sorte de pression de la part de qui que ce soit, dans mon entourage (….)”.
“La veille de mon départ encore, j’hésitais. En discutant avec toi de l’avenir qui m’attendait, que je voulais, je réalisais à quel point mon projet était insensé. Fugue ? Un mot bien péjoratif pour une quête si profonde” explique Diary Sow.
“Je suis consciente de l’audace, de la cruauté même de ma démarche. Je sais à quels tourments me livre ma décision, je pressens les conséquences qu’elle va engendrer, qu’elle engendre déjà. Je vais bien, je suis en sécurité. Sache que je suis terriblement, profondément désolée.” peut-on lire dans la lettre.
“Ma famille mérite de savoir, en attendant que je trouve en moi, le courage et la force de reprendre contact avec elle. Ceux qui cherchent une explication rationnelle à mon acte seront déçus, puisqu’il n’en a aucune :raconte la jeune femme.
“Je ne suis pas désolée d’être partie, je suis désolée des gênes occasionnées par mon départ et des gens que j’ai fait souffrir.”
Diary Sow étant un exemple de réussite, sa fugue soudaine avait donné lieu à de nombreuses spéculations. L’échange ainsi dévoilé devrait calmer les inquiétudes de ses proches.
Issue d’une famille modeste de Malikounda, près de Mbour (ouest), titulaire d’une bourse d’excellence, elle affirme n’avoir pas disjoncté à cause de la pression de la prépa comme d’autres boursiers ont pu souffrir des sacrifices consentis pour intégrer les prestigieuses écoles françaises.
« Il ne s’agit ni de surmenage, ni de folie, ni de désir de liberté. (…) Je n’aurais jamais cru que mon nom allait alimenter autant de débats, qu’autant de gens allaient s’inquiéter », précise-t-elle..
Quant à Marie-Louise Ndong, chargée du suivi des boursiers d’excellence au sein du Service de gestion des étudiants sénégalais à l’étranger (SGEE), rattaché à l’ambassade du Sénégal à Paris; elle affirme:
« Nous sommes soulagés pour sa famille, pour le peuple sénégalais et pour les étudiants qui se sont fortement mobilisés ».
Thierno Laye Fall, le président de la Fédération des étudiants et stagiaires sénégalais de France (Fessef), pour sa part renchérit: « Elle est partie de son plein gré, il n’y a rien d’autre à ajouter. Je lui souhaite le meilleur et tout ce qu’elle veut dans sa vie ».
L’étudiante a aussi eu une prise de contact avec la police judiciaire, a annoncé l’AFP et elle est « libre de ses mouvements et de ses choix », a précisé cette source proche du dossier.