Adjany Da Sila Freitas a été nommée ministre de la Culture, de l’environnement et du tourisme, lors du remaniement du gouvernement,opéré le lundi 6 avril par le président angolais João Lourenço, qui a fait passer le nombre de ministères de 28 à 21. Les nouveaux ministres sont entrés en fonction ce mercredi 8 avril. Ce super ministère à trois portefeuilles constitue une grande responsabilité sur les épaules d’une jeune exploratrice habituée au travail de terrain.
Biologiste et environnementaliste, Adjany Costa, a remporté, septembre dernier, le Prix des jeunes champions de la Terre pour la région Afrique, grâce à ses efforts en faveur de la préservation des de la biodiversité en Angola.
Adjany Costa est une écologiste et ichtyologiste basée en Angola. L’ichtyologie est la branche des sciences naturelles qui étudie les poissons des points de vue phylogénétique, morphologique, anatomique, physiologique, écologique, éthologique et systématique.
Avant sa nomination , elle était directrice du projet Okavango Wilderness de National Geographic, qui consiste à explorer et à arpenter le bassin du fleuve Okavango en Afrique, afin de protéger son écosystème vital. L’Okavango est le troisième cours d’eau d’Afrique australe par sa longueur. Il prend sa source près de la ville de Huambo en Angola central, avant de traverser la Namibie pour atteindre le Botswana.
Elle faisait partie d’une équipe de chercheurs et d’experts africains locaux, ainsi que de cinéastes, photographes et écrivains de National Geographic, explorant le bassin de la rivière Okavango depuis ses sources situées en Angola jusqu’au delta du Botswana. Ensemble, ils étudiaient la région pour enregistrer sa biodiversité extraordinaire, recueillir des informations sur la santé des eaux. Et documenter les progrès réalisés grâce à des images et des sons. Elle a ainsi parcouru 2 500 kilomètres avec cette équipe du National Geographic, où elle était la seule femme. Sa contribution dans le projet a conduit à la découverte de 24 espèces potentiellement nouvelles pour la science dans les hautes terres angolaises, dont 4 types poissons.
En plus d’étudier les poissons d’eau douce dans les bassins des rivières Okavango et Cuando, le projet consistait à créer une zone de protection marine le long de la côte sud-ouest de l’Angola, adjacente à la côte des squelettes en Namibie.
Protéger l’environnement en Angola
Adjany Costa est détentrice d’un Master en biologie marine,obtenu en 2010 et elle suit actuellement son cursus de doctorat. Elle a participé à plusieurs expéditions différentes dans le bassin de la rivière Okavango pour étudier les poissons d’eau douce du système.
Pendant ses études, ses recherches ont mené à la découverte d’un nouveau type de tortue olivâtre, exclusif à l’Angola.Cette constatation a renforcé sa volonté de conservation du projet Kitabanga, le seul projet de conservation des tortues marines angolaises, où elle a fait du bénévolat pendant 6 ans. En 2012, elle reçu une bourse pour le diplôme conjoint Erasmus Mundus M.Sc. en biodiversité marine et conservation, et a pu mener plusieurs projets de recherche dans certaines des meilleures institutions de recherche marine à Oviedo (Espagne), Faro (Portugal), Crète (Grèce), Gand (Belgique), Brême et Bremerhaven (Allemagne ).
En 2016, devenue directrice national du projet Okavango de National Geographic pour l’Angola, Adjany Costa a eu la possibilité d’acquérir de l’expérience avec les politiques, la politique et les processus décisionnels derrière la conservation. Simultanément, elle a commencé à travailler avec les communautés sur des activités de sensibilisation à l’éducation pour les adultes et les enfants dans les hautes terres angolaises. Ces deux expériences lui ont fait réaliser que les sciences naturelles et la recherche ne seraient jamais suffisantes pour activer la conservation dans un paysage aussi vaste si elles n’étaient pas associées à des politiques nationales et impliquant les communautés. C’est alors qu’elle a quitté le projet pour poursuivre son doctorat de recherche avec WildCRU (L’unité de recherche sur la conservation de la faune qui fait partie du département de zoologie de l’université d’Oxford en Angleterre).
Elle y travaille à développer un modèle de gestion communautaire des ressources naturelles (CBNRM) ascendant, adapté aux besoins, aux croyances, aux traditions et aux aspirations des populations Luchaze, en Angola oriental. L’objectif est de coupler la recherche et les connaissances traditionnelles pour améliorer l’élaboration des politiques, en assurant une protection maximale et réaliste de la faune et des ressources naturelles en luttant contre la pauvreté grâce à l’introduction de moyens de subsistance alternatifs dans les communautés rurales pauvres et éloignées.
Adjany Costa est membre du Comité de conservation de l’eau douce de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et elle travaille actuellement à la création d’une fondation entièrement angolaise qui vise à protéger la nature sauvage de l’Angola via un modèle de gestion communautaire des ressources naturelles.
Elle figure notamment dans le documentaire de National geographic intitulé « Into the Okavango » qui raconte l’histoire de la première expédition d’une équipe d’explorateurs pendant quatre mois sur 1 500 km dans les trois pays que traverse l’Okavango. Le film a notamment été diffusé au festival de Tribeca à New-York.
Consciente de la beauté naturelle de son pays, Adjany Costa doit désormais concilier la préservation de ces richesses, à travers le portefeuille Environnement, avec leur exploitation à des fins touristiques et culturelles. Un équilibre difficile, comme celui des écosystèmes qu’elle étudie.
Patrick Ndungidi
Journaliste et Storyteller
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