Ayi HILLAH est un homme de lettres togolais, voyageur, esthète, poète au verbe cajoleur et auteur de récits. C’est à Fontaine l’Evêque ; paisible ville du Hainaut en Belgique où il vit, qu’il a accepté de répondre à nos questions.

Bonjour Ayi HILLAH, présentez-vous à nos lecteurs s’il vous plait !

Ouf, vous commencez toujours les interviews par la plus difficile des questions. (Rires) Quoi dire ? Je suis Ayi HILLAH, écrivain et poète togolais.

À ce propos, vous vous définissez toujours comme étant un auteur togolais, alors que vous avez plus d’un passeport. Etes-vous particulièrement fier d’être Togolais ?

On est forcément de quelque part. Moi, je viens du Togo avant de connaître le monde. Et les joies rencontrées ailleurs ne peuvent jamais m’arracher à ma terre natale. Et puis, je vous le dis en toute sincérité, je suis un éternel enfant. De ce fait, le Togo, disons Lomé, ma ville natale, a toujours pour moi le charme de l’enfance ; ce quelque chose qui chante à votre âme un air envoûtant à chacun de vos pas. Quant à ce qui concerne la suite de votre question, je ne suis pas spécialement fier d’être Togolais. Je peux bien naître Népalais ou Botswanais. L’essentiel, c’est d’aimer ce que l’on est.

Sur les réseaux sociaux, vos commentaires, surtout vos choix littéraires font dire que vous êtes un iconoclaste. Que répondez-vous à cela ?

Non, non, personne ne m’a jamais traité d’iconoclaste. (Rires). À moins que… Bon, voyons ! Iconoclaste, je n’aime pas ce mot. Tout ce que je sais, c’est que je questionne la nature des gens. C’est un travail d’intellectuel et je ne passe pas en critique, surtout en critique littéraire, puisque c’est mon domaine, pour quelqu’un de complaisant. Pourquoi voulez-vous que je me prosterne devant la pléthore de demi-dieux superfétatoires qu’on nous demande de vénérer ? Vous savez, il y a des gens à qui on a fabriqué une légende qui n’est pas la leur ; une légende plus grande. Ceux-là ne méritent pas mon respect. Par contre, j’admire ceux qui sont entourés d’une légende d’ignominie alors qu’ils sont bien grands et plus propres qu’on ne nous le dise. Et, quand je découvre la pureté dont ces derniers sont faits, je m’incline et je les salue. Si c’est ça être iconoclaste, alors, j’accepte.

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Vous critiquez les gens. Mais, quand on vous critique, qu’est-ce que ça vous fait ?

C’est connu, j’écoute la critique. Vous savez, j’ai un ego très bas. Je le situe en deçà de mes chevilles. (Rires) Ceci dit, quand on me critique conformément aux usages, ça m’arrive de baisser le nez et de réfléchir sur mon travail. D’ailleurs, je déteste quand on me dit que j’écris bien. Ça ne m’aide pas à m’améliorer, voyez-vous ? Par contre, ce qui m’insupporte, ce sont les coups de massue. Si vous voulez une image, ce sont les coups qu’on assène en dessous de la ceinture, pas dans les règles de l’art.

Comment vous définissez-vous comme auteur ?

Ça dépend de la matière, je parle du genre littéraire. Quand j’écris de la poésie, je me considère comme un parfumeur, quelqu’un qui crée des fragrances qu’il jette dans le vent et qui se réjouit quand la senteur qu’il libère s’élève et embaume les environs. En revanche, comme auteur de récits, j’ai tendance à dénoncer, à dire ce qui ne va pas, ou, si vous voulez, à dire ce que je pense être vrai.

Dans nos systèmes éducatifs africains, rares sont les programmes qui traitent d’auteurs africains, alors que le continent n’en manque pas. Comment expliquez-vous cela ?

Cela n’a pas de sens quand on sait que l’écriture dans bien des cas est une déposition. L’auteur africain, même s’il écrit le monde, il l’écrit à partir du prisme par lequel il le voit, l’observe. Et c’est vraiment regrettable que cette vision du monde propre à l’écrivain africain ne soit pas enseignée chez nous, dans nos écoles. Quand on refuse à la relève de demain de penser le monde à partir de ses propres réalités, on l’oblige à bâtir son savoir sur l’expertise des autres. On nie sa personne. Regardez autour de vous, si l’Africain porte un ensemble costume et cravate quand il fait plus de 36°C, il y a une raison à cela.

Quelle approche de solution pouvez-vous préconiser ?

L’écrivain africain aura écrit des chefs d’œuvre toute sa vie, cela ne changera rien s’il n’y a pas une réelle politique de la part des autorités de nos pays à faire de l’enseignement de notre littérature une priorité.

Ça fait un moment que vous n’avez plus publié un ouvrage. Comment expliquez-vous cela ?

Sans être prétentieux, je n’ai jamais connu le fameux vertige de la page blanche. Voyez-vous, j’ai la chance d’être poète et prosateur. Si je mets un an, voire deux pour écrire un récit, ceux qui me suivent sur les réseaux sociaux vous diront qu’il m’arrive d’écrire deux voire trois poèmes par jour. À ce rythme, je peux publier un recueil de poèmes tous les mois si le but, c’est de publier un ouvrage, ce qui n’est pas le cas.

Un conseil aux jeunes auteurs ?

Les jeunes auteurs ? Je vous signale que je n’ai pas cent ans. (Rires). Sérieusement, ils n’ont pas besoin de lire cette interview pour choisir leurs chemins. Ceci dit, je suis ouvert aux échanges et ceux qui m’approchent savent que j’aime partager le peu d’expériences que j’ai.

Que trouve-t-on dans votre cabinet d’écriture en ce moment ?

J’ai trois manuscrits prêts à être publiés ; un récit, un roman et un recueil de poèmes. Il s’agit des choses qui me tiennent capitalement à cœur, d’où le temps mis pour les écrire. Comme je vous le disais, je les aurais publiés depuis si le but, c’est d’avoir un ouvrage sur le marché. À mon âge, il faut prendre le temps pour faire les choses.

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Un scoop ?

Mon prochain livre sort dans quelques semaines. Il a pour titre Il s’appelait Mouammar. C’est un livre dont l’ancrage se situe à Syrte et qui redéfinit la guerre en Libye et l’assassinat de Mouammar Kadhafi.

Votre mot de la fin ?

Sur le trajet que nous avons coutume de parcourir entre la naissance et la mort, le mot de la fin ne se dit pas à midi. Je risque d’être aphone quand vient le soir. (Rires)

Merci Ayi HILLAH !

C’est moi qui vous remercie. Ceci n’est pas un mot de la fin (Rires).

Pour contacter l’écrivain Ayi Hillah

Facebook : Ayi Hillah

Twitter : Ayi Hillah

Interview réalisée par Essenam K²

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