Le cinéma camerounais a le vent en poupe à l’instar de celui de son voisin nigérian. C’est donc parmi les rares fiertés d’Afrique dans ce secteur. Le travail acharné de ses acteurs, réalisateurs, producteurs entre autres, se lit dans les résultats à l’écran. Et cela n’est possible que grâce à ces jeunes acteurs talentueux et intrépides à l’exemple d’Alain Bomo, alias le Denzel Washington du cinéma camerounais, celui-là qui nous fait l’honneur de nous accorder cette interview.

Bonjour Alain, présentez-vous à nos lecteurs

Je suis Alain Bomo , originaire  de l’Est du Cameroun, plus précisément je viens d’Abong Mbang, ma maman est anglophone de Bamenda, de Bali Nyonga. Je suis âgé aujourd’hui de 37 piges. Je suis acteur, producteur et réalisateur de Cinéma. Je suis aussi le Président de la « Cameroun Actors Agency », une agence des acteurs du Cinéma.

Le cinéma a t’il été votre vocation de toujours ?

En réalité je dirai que je n’ai pas eu de vocation dans le cinéma. En fait mon aventure avec le cinéma commence quand j’étais au Lycée de Ngaoundere dans l’Adamaoua au Cameroun. Là-bas j’avais un grand frère qui était déjà à l’Université et qui aimait généralement me dire que j’avais un peu la gueule de Denzel Washington, donc Il m’assimilait et m’appelait pratiquement Denzel Washington parce qu’il suivait beaucoup les films de l’acteur. A l’époque je ne connaissais pas l’acteur car nous n’avions pas d’électricité  pour regarder la télé.  C’était l’époque des cassettes et on n’avait pas de magnétoscope.

Alors j’avais toujours nourri ma petite idée que toutefois quand je partirai en ville j’irai voir un film de Denzel histoire de voir les traits auxquels on m’assimilait.

C’est ainsi que je suis arrivé à Yaoundé pour les études universitaires. Il faut rappeler qu’à la base, j’étais sensé devenir magistrat, selon les souhaits de mon père.

 Pour la petite histoire, mon papa était commandant de brigade et il avait l’habitude d’arrêter des malfrats qui, quelques jours après ressortaient des prisons, faute de jugement impartiaux. Il avait donc souhaité que je fus magistrat afin que ces injustices soient rétablies étant sûr et certain que tel qu’il m’a éduqué dans la droiture et l’intégrité, forcément je ne pourrai pas laisser les sortir les bandits.

C’est ainsi que je suis venu à Yaoundé. Cependant ma première grosse déception est arrivée quand mon papa est parti à la retraite. Cela a brisé mes rêves de magistrat, mon père n’ayant plus les moyens pour aider à payer mes études de droit au SOAP (Le Salon de l’orientation académique et professionnelle).

Je suis donc entré en sociologie. J’ai fait la première année et c’est là que pour la toute première fois de ma vie j’ai connu l’échec parce que j’ai échoué au premier semestre, comme on dit chez nous “Le mûr avait parlé et c’était à blanc”. J’avais raté toutes les 5 unités d’enseignement, du coup cette histoire m’avait tellement choqué. L’école sur laquelle j’avais misé était en train de me décevoir. C’est comme ça qu’un jour, des blancs sont venus dans notre amphi pour nous annoncer un casting, c’était le casting de Nescafé. Avec quelques potes, nous avons décidé de nous y essayer.

C’était mon tout premier pas dans le cinéma, un peu par dépit, disons une espèce de questionnement de moi-même, de mes choix, de ma vocation même primaire parce que j’ai beaucoup vécu dans l’ombre de mon papa.

Tous ces événements m’ont permis de pouvoir affûter et pouvoir décider de façon claire ce que je voulais faire et ce jour comme on dit” Bon gré, mal gré”,  c’est le cinéma qui était venu à moi.

Et ensuite ?

Je me retrouve donc en train d’aller faire la publicité de Nescafé. C’était au centre culturel Camerounais et nous sommes dans les années 2003 je crois. Donc je me retrouve seul, mes amis m’ayant laissé tomber au dernier moment. On était 600 et je n’y connaissais personne.

Les gens passaient puis c’était mon tour. On m’a dit de faire semblant de boire une tasse de nescafé et de montrer sur mon visage l’expression d’une exaltation, d’un exutoire, de montrer exactement cette béatitude à boire du café. Il fallait montrer un haut degré d’agréabilité dans le visage. J’ai aussi fait ce que je pouvais, je ne sais même pas trop ce que je faisais, bah ça a plu apparemment puisque j’ai été retenu parmi les 70 sur 600 On nous a encore demandé de repasser un deuxième casting parce qu’il fallait diminuer au fur et à mesure. Et je me suis retrouvé dans les 15 parce qu’on a encore tamisé. Sur les 15 restants, seuls 5 devaient rester au final.

En fin de compte je m’étais retrouvé avec un concurrent de force, c’était un arabe. Non seulement il était plus beau que moi, mais il avait aussi le teint que les gars voulaient, il était peulh, teint clair, ce que ces gens voulaient en réalité. Je me suis senti un peu menacé, je voulais fuir en fait. J’ai dit aux blancs qu’en réalité moi je ne veux même pas entrer dans le cinéma par la publicité. Je veux plutôt entrer par un film. Je leur ai dit « Regardez-moi un peu par la tête par la peau d’un Denzel Washington camerounais !!!» un charabia que même aujourd’hui honnêtement si on me dit ce que je racontais, je ne pourrais même plus le redire. En réalité ça faisait référence à ce Denzel Washington que jusque-là je n’avais même pas encore vu à la télé. C’était une façon gauche de leur dire « bah voilà moi je veux être le Denzel Washington en version camerounaise ». Il y avait quelqu’un dans la salle qui était à la caméra, Georges Biyong, je l’apprendrais plus tard, qui s’est approché de moi et m’a soufflé à l’oreille « Tu peux la fermer un peu jeune homme?» …. « Depuis que tu vois les gens entrer ici tu es la seule personne à qui le blanc a accordé plus de temps, tu es la seule personne en qui ils ont vu quelque chose et je crois que tu peux réussir ce casting. Donc essaye de te concentrer, ferme là et concentre toi à faire ce qu’on te demande, d’accord?»… Puis il s’est retiré. Cela m’a requinqué,  J’ai donc décidé de reprendre le casting.

Au final tout le monde était content. Georges Biyong est même venu me donner une tapote là à l’épaule et m’a dit bravo !!

Malheureusement je n’ai pas été retenu, c’était mon concurrent qui avait eu le rôle, ils sont donc partis faire la publicité de Nescafé et je suis resté. Mes premiers pas dans le cinéma.

Puis il y a eu «Confidences » !! Vous y incarnez le personnage de Bagson ; c’est là que tout démarre !! Comment avez-vous eu le rôle ?

Après l’épisode de Nescafé, j’ai reçu un mois plus tard un appel de Georges Biyong qui me faisait comprendre que je devais venir le retrouver au Centre culturel Français”. Je suis venu, je l’ai rencontré, il m’a remis le gros scénario du film « Confidence  just say no » de Cyrille Masso entre les mains. Il m’a dit mot pour mot, phrase pour phrase, rien ajouté « Tu veux être le Denzel Washington camerounais, alors prouve le». Puis il est retourné sur ses pas en me disant qu’il me rappellerait plus tard.

Voilà comment j’ai commencé à lire un scénario que je ne comprenais aucunement Comme j’avais lu un peu de romans et quelques œuvres, Le Cid, et quelques autres, j’ai commencé à me rendre compte que ce sont des répliques, des didascalies, bref ça parlait dialogue et personnages. C’est comme ça que j’ai commencé à lire par rapport à mes références littéraires. Deux semaines plus tard j’ai été rappelé pour interpréter tous les personnages parce qu’il m’avait dit de tous les interpréter. Je suis parti au casting, il m’a présenté à Cyrille Masso qui m’avait accueilli un peu froidement. Cyrille m’a dit « toi le gamin c’est toi qui veux arracher le rôle à Thierry Ntamack? Il faut bien que tu poses tes pieds par terre» !!!

A l’époque tout le monde m’appelait « le gamin » parce que j’avais encore une tête de gamin. Après on a fait une scène, il fallait donc nous mettre en scène, je crois Thierry était là, Koppo était là, Tatiana Matip était là, Georges Biyong était là, Cyril était là aussi, son équipe technique était là, ses cameramen, bref tout le monde. Il était question d’embarquer Tatiana dans une connerie d’élève de Lycée ; il fallait l’embarquer malgré elle en boîte. Moi j’étais perdu. Thierry a commencé, Tatiana a commencé, Koppo commencé, ils se changeaient les thèmes, moi j’étais perdu, je suis resté calme, très calme, je ne disais rien puisque je voulais d’abord comprendre ce qui se passait.

Au bout d’un certain temps, ils se sont tournés vers moi pour savoir si je n’avais rien à dire, j’ai dit « Bien, Ok voici comment on va faire». Donc j’ai commencé à leur donner des instructions en style un peu gangster de rue. Pendant un moment ils n’ont pas arrêté la scène. Puis Cyrille a dit « Coupé» et tout le monde s’est mis à applaudir. On est donc parti, on a pris la vidéo, on a mis ça maintenant en écran pour que tout le monde regarde. Je crois que ce jour-là j’ai été félicité par toute l’équipe.

Bref voilà comment ça a commencé, on a commencé à faire les répétitions. J’ai interprété presque tous les rôles, normal, j’avais une tête de lycéen, d’ailleurs je sortais à peine du Lycée, j’avais encore la tête de l’emploi. Voilà comment on a commencé à me mettre partout, on me testait partout.

Au final j’ai eu le rôle de Bagson, mais je me souviens ce jour-là que Cyrille m’a amené dans son bureau, m’a fait asseoir et m’a dit : « Jeune homme en réalité je dois te donner le personnage d’Anani mais tu sais il faut commencer quelque part. Thierry est dans le métier depuis, Koppo est dans le métier depuis, tu ne peux pas venir prendre le personnage ce n’est pas possible. On ne te connait pas, on ne sait pas qui tu es et tu sais le cinéma c’est d’abord une question de gré à gré, il faut que je connaisse ta tête il faut que je sois sûr que tu ne vas pas me lâcher pendant un personnage principal.

C’est pas donné, je ne te connais pas, je ne sais pas d’où tu sors, je ne connais pas ta moralité donc Il n’est pas question que je te donne un personnage comme ça. Malheureusement je vais te donner le personnage de Bagson mais tu mérites amplement, tu as du talent. Il faut que tu continues à faire voir ce que tu as dans les tripes»…

 Voilà donc comment on a remis le personnage aux autres et j’ai pris un petit rôle. Un petit rôle parce que les grands frères savaient déjà créer des problèmes. Je me souviens parce que beaucoup venaient déjà me dire « Désolé jeune homme mais tu viens de nul part, tu ne peux pas avoir un personnage comme ça parce que en réalité à l’époque pour faire un film c’était très compliqué au Cameroun. On n’avait pas de vidéo, on tournait encore avec les DVCam et Cyril c’était la plus grosse production qui était soutenue par le ministère de la culture donc tout le monde avait les yeux sur ça en fait et l’équipe technique venait de l’extérieur donc c’était un peu compliqué et tout le monde n’était pas content qu’on me donne ce rôle. Ça avait trop fait des problèmes et Cyril avait eu trop de pression du côté de ceux qui étaient déjà dans le cinéma. Voilà comment on m’a donné ce petit rôle. Mais pour moi c’était déjà un honneur d’être là, il y avait tous les noms que je voyais qui étaient là donc pour moi c’était déjà une grosse victoire de me retrouver avec ces gens. Je me disais seulement Alleluia j’ai quand même déjà un petit truc ça me suffit. Pour moi c’était une grosse victoire. Voilà j’ai donc eu le personnage, j’ai joué et à chacune de mes sorties c’était la totale. Au final, ce n’est pas moi qui ai choisi le cinéma, c’est le cinéma qui m’a choisi.

Alain Bomo, après confidence l’aventure ne s’est pas arrêtée là…

Longs métrages

  • Confidence de cyrille Masso ; rôle (bagson) ; 2003
  • Sentence criminelle de Prince Onana ; rôle (snake) ; 2007
  • 139…les derniers prédateurs de Richard Djif ; rôle (black) ; 2009
  • W.a.k.a de Françoise Ellong ; rôle (luc) ; 2012
  • Touni bush : bastion du maquis de Pascaline NTEMA ; rôle (Fomo) ; 2013
  • Le colis 2 de Brice KAMGA ; rôle (Abel) ; 2014
  • Larmes du crime de TENE. K ; rôle (frank boyomo) ; 2014
  • Sweet danse de Chantal YOUDOM ; Rôle (Jack) ; 2015
  • Auto-reverse de fotso ; Rôle (batsana) ; 2015
  • Peau de panthère de Brice KAMGA ; Rôle (Fono) ; 2016
  • Sangouna de saimon william NKUM ; Rôle (tchakounté) ; 2018
  • Second life de michel POUAMO ; Rôle (jumeau :nathan /père léon , 2019

Courts métrages

  • Gigolo et trop de Agnès YOUGANG ; 2004
  • Menteur professionnel de Charlotte NGO MANYON ; 2005
  • Electrochoc de JOB ; 2006
  • Au bout de la nuit ; 2008
  • Au nom de l’Amour ; 2009

Télévision (séries)

  • Rentrée 100 façons de Rosalie Mbellé ; rôle (Percy) ; 2008
  • Haute tension de Seraphin Kakouang, H.Tada’a, F. Alima rôle (Elias) ; 2009
  • Au coeur de l’amour de C.Youdom ; rôle (Thom) ; 2010
  • Balles perdues de Léopold ELOUNDOU ; rôle (Eric) ; 2011
  • Harraga : bruleurs de frontières de Serge Alain NOAH ; rôle (Bath) ; 2012
  • Lex Nostra de Gérard D. NGUELE ; rôle (Steven) ; 2013
  • Notre mouton bien aimé de Francine KEMEGNI ; rôle (Patrick) ; 2014 et 2016
  • Echet et Matt de william saimon NKUM ; rôle william Kenmoe ; 2019

Ça veut dire que le cinéma camerounais se porte bien…

Je crois que ce sera une méprise pour moi de dire que le cinéma camerounais se porte bien. Le cinéma camerounais est en train de subir des mutations, il est en train de changer. Le cinéma camerounais comme on a connu avec les Muna Moto, c’est terminé ce cinéma. Maintenant c’est beaucoup plus dans la vidéo. Il est entrain de traverser une phase déterminante de son histoire. S’il rate ce moment clé ce sera fini, ce sera la totale, il sera jeté à la poubelle. Le cinéma camerounais ne se porte pas bien.

Il a besoin de se restructurer, de savoir qui fait quoi, dans quoi. Le cinéma camerounais a besoin d’avoir une politique culturelle, du matériel de pointe, du financement, de l’implication de l’État pour avoir un cinéma institutionnel avant d’avoir d’abord un cinéma commercial. Le cinéma camerounais doit se donner les objectifs à atteindre, il doit montrer au peuple son utilité. Le cinéma camerounais est dans cette profonde mutation. Pour ma part, en même temps elle ne se porte pas bien en même temps il y a beaucoup d’espoir parce que comme les choses sont entrain de partir, si ce cinéma se retrouve dans cette mutation, je vous assure personne ne pourra arrêter le cinéma camerounais dans deux/trois ans. Donc voilà ce que je peux dire en ce qui concerne le cinéma camerounais

Votre ascension a t’elle atteint son apogée ?

L’apogée de ma carrière, non, loin de là. Je suis même plus serein qu’au début, je dis que c’est même maintenant que les choses commencent. C’était le temps d’affûter mes armes dans le cinéma. Ça m’a donné une espèce de nom, de fiabilité, de crédibilité. Le temps que j’ai passé c’était un temps de conception ou alors c’était ce temps où l’enfant devait être conçu pour qu’il soit né. Donc disons que c’est maintenant même que ça commence parce que c’est une espèce de nouvelle renaissance pour moi, parce que j’ai déjà les tenants et les aboutissants. Je sais exactement comment mettre les pieds, où les mettre et où ne pas les mettre. Je sais qu’est-ce qu’il faut faire et donc je sais comment trouver de l’argent. Parler d’apogée alors que je suis en train de commencer, là ça me fait rire. Non ce n’est pas l’apogée, pour moi c’est même le début du commencement. C’est là même où tout prend en fait son essence, sa puissance et son sens. Vous verrez, je suis très confiant et mes paroles me donneront raison.

Comme toutes les années, je pense que je peux dire merci à Dieu. Depuis que j’ai commencé le cinéma, je n’ai jamais passé des années sans tourner jusqu’aujourd’hui. Je rends donc grâce vraiment à Dieu parce que je dis souvent que je n’ai pas plus de talent que les autres. Je pense simplement que c’est quelque chose que Dieu m’a donné c’est tout. Et quand bien même je ferai un film qui sera un flop, je vous assure on me remarquera toujours dans ce flop. Quand bien même je ferai un film qui sera « waow » et sera la totale, je vous assure c’est là même on me remarquera plus. Donc je veux dire qu’en réalité c’est une grâce, c’est un don de Dieu. C’est lui qui fait briller en moi. J’ai toujours dit ça parce que je sais pas ce que je fais plus que les autres honnêtement mais ce que je fais est toujours en train de briller et je crois que ça c’est une force au-dessus de moi, c’est une force qui impulse ce que je fais, une énergie positive qui me met toujours dans une lancée d’élévation et je pense parce que je n’appartiens à aucune autre divinité que Dieu, Yahvé, Jéhovah tout puissant, c’est ça ma divinité, la divinité à laquelle je me prosterne et je prie.

Depuis que je suis parti à l’école de formation de l’IFCPA, Institut De Formation Et De Conservation Du Patrimoine Audiovisuel De La CRTV, j’ai fait mes deux années là-bas avec beaucoup de peines. Mais j’y ai appris beaucoup de choses sur mon métier, j’ai fait des stages pour comprendre la formation, pour comprendre mon métier et depuis les années 2010 parce que je suis sorti de l’école de formation en 2010, ma carrière ne fait que monter crescendo.

Des projets en cours ?

J’ai beaucoup de projets. J’ai 4 séries en discontinue que je dois faire à Douala à partir d’Octobre; deux long-métrages à faire, deux autres séries hors du pays dont une policière. Cette année je serai même encore plus occupé que les deux dernières parce que la demande est encore plus forte. J’ai beaucoup de projets en cours et je ne vous parle même pas de mes projets perso que je suis obligé de mettre en suspens pour  2021 probablement parce qu’il me faut engranger beaucoup d’argent, il faut que je travaille beaucoup pour me faire de l’argent parce que je ne veux compter sur personne, pas même sur l’État pour faire mes propres projets. Je veux compter juste sur Dieu et si j’ai les partenaires alléluia, si l’État se prononce pour moi, tant mieux. Mais comme ils n’ont jamais rien fait pour moi je les mets de côté. Je compte d’abord sur moi et mes propres forces ainsi que sur mon Dieu.

Des prix ou des distinctions depuis vos débuts dans le cinéma à ce jour ?

Je suis un peu comme Al Pacino qui a beaucoup plus subit les frasques du développement de ce cinéma. En réalité pour comprendre un peu pourquoi jusqu’ici on m’a boudé beaucoup pour les prix en tant que meilleur acteur, c’est simplement parce que je n’ai pas ma langue dans ma poche. Comme je vous le disais tantôt je suis à la tête de la Cameroun Actors Agency, l’agence des acteurs et en même temps ça défend les intérêts des acteurs et fait la promotion de ces derniers. Dans l’optique de mes fonctions je me suis retrouvé entrain de dérouiller le système, les personnes qui étaient là, de leur dire leurs 4 vérités et vous voyez que ce n’est pas souvent évident parce que c’est un milieu très fermé et les gens n’aiment pas les gens qui disent souvent les choses telles qu’elles sont donc j’ai eu trop de problèmes.

Dieu merci je suis toujours resté dans ma logique de vérité. Je préfère défendre une cause noble, ce qui est bien pour moi et pour ceux qui viendront après moi. Moi je n’ai pas eu la chance que ceux qui soient venus avant moi aient débroussaillés ce travail du cinéma camerounais parce qu’il y a trop de frasques contre les acteurs. J’ai pris ma destinée à bras le corps et aujourd’hui que Dieu me donne au moins la possibilité d’avoir au fur et à mesure un petit nom, je continue amplement à peser de tout mon poids pour essayer de renverser si non détruire toutes les choses afin de les reconstituer et pour les retravailler la vision que, j’en suis sûr, beaucoup d’autres épousent. C’est mon travail qui fera en sorte faire que même les aveugles vont dire aux gens « vous ne voyez pas le travail de ce mec depuis des années ? ». Revenant à la question principale, j’ai reçu le prix de meilleur acteur 2018 au LFC AWARDS.

Et depuis tous les autres m’ont boudé. On a toujours refusé mes films dans les festivals, on a toujours tout fait pour me dire qu’il est nul, qu’il ne vaut rien mais bon c’est rien par rapport à là où je sais que je suis en train d’aller. Pour le moment je n’ai que ce prix. J’espère qu’il y en aura d’autres encore ; des distinctions ailleurs, des distinctions d’honneur, de reconnaissance de carrière. Le ministère de la culture aussi m’a fait une faveur donc je suis entré dans l’histoire parce qu’ils ont commis un ouvrage pour rendre hommage aux  grandes figures du cinéma de la culture au Cameroun et j’en fais partie.

Il faut essayer de bouger les choses pour les générations qui viennent, pour que les choses changent il faut que ceux qui ont le pouvoir de dire quelque chose ne se taisent pas et qu’ils continuent de pousser et forcément les lignes vont bouger, la faille va se trouver et on va trouver beaucoup mieux devant.

Quels acteurs africains ou internationaux vous ont le plus inspiré ?

Tout a commencé avec Denzel Washington, avec son rôle de Malcolm-x.

Le jour où j’ai vu Malcom-X,  j’ai été frappé comme d’illumination. J’ai pris beaucoup de films de ce monsieur, j’ai étudié son jeu d’acteur. Certes j’ai étudié le jeu de beaucoup d’acteurs camerounais, américains et même africains, mais c’est celui de Denzel Washington qui m’a le plus inspiré.

Je dis souvent aux gens « je suis un tricheur ». Je suis ce genre de personnes qui observent beaucoup les gens. J’observe beaucoup et ce que je vois chez les autres je le transforme à ma façon et quand j’y mets ma façon ça marche toujours. J’ai beaucoup appris à regarder les gens, à regarder leurs techniques de jeux, leurs techniques vocales, à regarder leurs façons de se déplacer devant la caméra, à regarder comment ils utilisent leurs regards, à regarder même les techniques de jeux d’acteurs qu’ils utilisent. C’est là que j’ai pu prendre chez chacun quelque chose.  J’ai pris de Gérard Essomba, Emile Abossolo Mbô, Éric Ebouaney, Denzel Washington, Jamie Fox, Will Smith, Tom Cruise… J’ai pris le jeu de tout le monde pour faire ma part et maintenant je le transforme à ma façon. Pour résumer, la personne dont j’ai le plus appris sur sa technique, son déplacement, sa mobilité, son regard c’est Denzel ; le reste c’était des compléments.

La collaboration de vos rêves sur un film 

Bien entendu ma collaboration des rêves c’est Denzel Washington. Je vais me retrouver un jour devant lui, lui donner une réplique. Je crois que ça sera un peu un immense honneur pour moi. Si Dieu le veut je le ferai.

Alain Bomo dans 10 ans !

Alain Bomo dans 10ans ce sera un chef d’entreprise qui aura une grosse maison de production. C’est quelqu’un qui aura dans 10 ans un Acting School, une école de jeunes acteurs. Alain Bomo Bomo dans 10 ans c’est quelqu’un qui sera pluridimensionnel. Il sera un terrible business man, il va faire un peu de tout. Il va s’intéresser à la science, à l’agriculture, à l’éducation, à la reproduction de la CAG à travers le Cameroun, l’Afrique et même le monde. Alain Bomo Bomo va faire des films à gros budget, des films sur l’histoire du cinéma camerounais parce que l’une des missions que je me donne c’est de retracer l’histoire, nos scandales, nos frasques, nos réussites, nos légendes, nos mythes à travers le cinéma. Je voudrais véhiculer cela. Je ne voudrais pas faire du Cinéma des autres, je voudrais faire du Cinéma pour d’abord mon peuple camerounais, mon peuple africain, puis enfin mon peuple du monde. Je commencerai d’abord par satisfaire le cinéma camerounais parce que c’est l’une des grosses missions qu’on a jusqu’aujourd’hui, c’est intéresser le spectateur camerounais à la chose du cinéma parce qu’il ne se retrouve pas, parce que ce que nous traitons il ne s’y reconnaît pas et je me suis donné la mission dès que je commence à produire, de mettre cela en exécution.

On parle aujourd’hui du grand dialogue national est-ce qu’on a préparé les mentalités à comprendre ça? En réalité on devait faire des films pour préparer les mentalités à ça, on devait faire des films concurrents, on devait faire des films pour amener les gens sur une même table parce que le plus difficile c’est que le noir n’a pas compris ce qu’on colonise d’abord, on conquiert l’homme d’abord par son mental avant de le conquérir physiquement. Donc si on avait préparé ce grand dialogue depuis par des films, par des thèmes qui peuvent accrocher avant qu’ils s’essayent pour le débat, tout sera plus fluide. Donc c’est ça ce que c’est que l’image. L’image est la plus grosse force et la plus grosse puissance pour changer les mentalités. A partir de 2021 ma priorité sera de faire des films pour conscientiser.

Alain Bomo en 3 mots !

Fidélité, Intégrité, Dieu

Quel conseil donneriez-vous à la jeune génération fraichement arrivée dans les méandres du cinéma ?

Le conseil que je vais donner à tout jeune acteur, tout jeune cinéaste c’est de se former avant tout. Je ne sais pas pourquoi les gens ne veulent pas comprendre que quand tu fais un métier auquel tu n’as pas été formé, tu es comme un charlatan. Le jeu d’acteur c’est un art mais avant tout une technique. Si tu n’as pas été formé tant dans le comportement que dans l’art même, tu ne peux rien. Tout métier a sa déontologie, tout métier a ses canons, ses codes et si tu ne les apprends pas comment est-ce que tu pourras t’en sortir? «Ne soyez pas des incultes parce que de nos jours ça ne sert à rien d’être vedette, ça ne sert à rien de monter au sommet et de revenir t’asseoir au sol parce que tu n’as pas pu te maintenir au sommet». Il faut pouvoir se former auprès des écoles. Nous tous on a commencé dans le tar mais il faut se faire former auprès des icônes. Il y a le Cours Drama tenus par Gérard Essomba, la Buea School Academic à Buea. S’il vous plaît jeunes acteurs formez-vous. Après vous verrez ce que je vous dis. Moi j’ai eu la chance d’être passé dans les mains de Daniel Ndo et au Cameroun on sait qui est Daniel Ndo. Je ne suis pas fortuné, je suis un pur produit camerounais et la chance que j’ai, c’est que je côtoie le monde. La façon dont je me positionne devant la caméra les amis c’est parce que j’ai été formé en brave. A l’extérieur les gens me demandent où j’ai été formé et je dis que j’ai été formé au Cameroun par Daniel Ndo à l’IFCPA. Cet homme m’a formé tant dans ma personnalité que dans ma personne parce sans lui je ne serai pas ce que je suis aujourd’hui, ça c’est la pure réalité. Il y a trois personnes que je remercie et que je remercierai toujours dans ce cinéma. Il y a Georges Biyong qui m’a découvert, Cyrille Masso qui m’a donné ma première chance de pouvoir jouer dans un film et il y a Daniel Ndo qui m’a permis d’explorer le métier d’acteur, qui a permis que je donne un souffle inédit à ma carrière. Donc je ne saurai comment dire merci à ces personnes.

Vos mots de fin ?

Vraiment je vous remercie, merci pour le fait que vous vous soyez intéressé à moi, pour cette considération, je vous dis merci. Je dis merci à ce travail que vous faites. Bravo à vous, je crois que chacun dans son sens, dans la voie où Dieu l’a appelé, si nous unissons nos forces nous pouvons faire de grandes choses. La jeunesse africaine et particulièrement camerounaise a un problème: elle ne se met pas ensemble. Et si on se mettait ensemble chacun dans son domaine je vous assure ce pays sera en moins de 5 ans un pays de référence en Afrique et sera cité même de par le monde. Donc la seule chose que je demande c’est que les camerounais se mettent ensemble, qu’ils essaient de parler le même langage. Il ne faut pas que le camerounais soit un loup pour le camerounais. Au contraire il faut que le camerounais soit le bon pour l’autre camerounais. Il faut que tout camerounais et tout africain en général pense que quand il est à un endroit il faut qu’il tire les autres pour les éparpiller au-dessus de lui afin qu’au fur et à mesure comme un travail d’échelle. La marche vers le sommet sera grande, elle sera logique, soutenue par tout un chacun. Donc c’est ça que moi je peux dire comme mot de fin et que l’avenir nous dise exactement ce que je suis en train de dire. Merci

Pour contacter Alain Bomo:

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Rédacteur sur MyAfricaInfos.com

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