Engagé pour l’Afrique et les Africains, Claudy Siar est un homme de média qui ne ménage aucun effort quand il s’agit de soutenir des initiatives qui touchent la valorisation des noirs. Il est le parrain de la 4e édition de la campagne de sensibilisation contre la dépigmentation volontaire de la peau; S’Aimer Au Naturel.
Au-delà d’une campagne de sensibilisation, S’Aimer Au Naturel est une invitation à l’acceptation de soi et une ôde à l’identité africaine. Cette campagne est une initiative commune des médias Pensées Noires Magazine et le site MyAfricaInfos.com. Claudy Siar qui a accepté joindre son image à cette initiative en tant que parrain de l’édition 4, répond aux questions de Alain Mouaka; Ceo de Pensées Noires Magazine.
Claudy Siar : Je suis producteur de l’émission Couleurs Tropicales. J’ai été délégué interministériel pour l’égalité des chances des Français d’outre-mer.
On peut aussi dire que je suis un chef d’entreprise dans les médias; j’ai créé une radio, que j’ai revendu. Avant cela, j’ai dirigé une radio. J’ai également une société de production audiovisuelle.
Et puis, je vous annonce en exclusivité que je vais diriger deux chaînes du groupe NewWorld ; NEWWORLD MAGAZINES et NEWWORLD MUZIK.
Mon africanité est le socle de mon identité. Et pourtant, plusieurs origines cohabitent en moi. Il faut y ajouter ce qui constitue mon éducation due à la nation qui est la mienne, la France. Ne jamais oublier qu’une langue maternelle est obligatoirement une dimension essentielle de votre identité plurielle. Lorsque vous êtes le fruit d’une histoire jalonnée de crimes contre l’humanité ( esclavage, colonisation, discrimination…), cela a un impact sur ce qui vous définit . De tout ça, il faut arriver à faire un être à la psyché cohérente. En vérité, pour les peuples afros, c’est ce qu’il y a de plus difficile. Certains en sont conscients et d’autres non. J’ai réglé ce problème. Cela me rend plus serein et plus déterminé.
Le hasard de la vie et des épisodes de l’humanité ont fait de moi un AFRO-CARAÏBÉEN DE LA GUADELOUPE, né à Paris.
Sans complexe et persuadé d’être plus fort et plus riche que beaucoup.
Personne ne peut imaginer la puissance de ma mère. Ma Maman était la plus incroyable des femmes. Son enfance ne fut que violence. Mais c’était un être d’amour.
Elle nous a inculqué l’estime de soi, le goût de la liberté, la possibilité de choisir sa vie, les vertus du travail, le sens du sacrifice.
Pour que jamais nous ne sombrions dans la délinquance juvénile comme bon nombre de nos copains d’enfance, Maman, infirmière, a travaillé jour et nuit ( à l’hôpital la nuit, dans une clinique privée la journée). Elle y a laissé sa santé puis sa vie.
Elle nous disait « tous les sacrifices que je fais sont autant de sacrifices que vous n’aurez pas à faire. Mais vous aurez votre part ». Maman est décédée à 69 ans après deux arrêts cardio- vasculaires, une hémiplégie, et un diabète…
C’était un être d’amour.
Très bien ! L’émission est née le 13 mars 1995. C’est l’un des deux plus anciens programmes quotidien de RFi et présentée par la même personne.
Cependant, j’aimerai bien changer le nom. Mais la décision ne m’appartient pas totalement, même si le nom « Couleurs Tropicales » est ma propriété. Je n’ai jamais aimé le nom. Il était obsolète dès le début. Comme quoi, le contenu est toujours plus prégnant que le contenant.
Je l’ai pourtant trouvé et adopté afin de répondre à l’exigence du président de l’époque. En effet, il voulait un nom proche de « Canal Tropical » que présentait Gilles Obringer.
C’est un phénomène qui m’a toujours interpellé, que j’ai dénoncé et cela depuis mes 20 ans. Pour autant, pointer un doigt accusateur ne fait pas réfléchir les accusés. On ne peut comprendre ce phénomène d’autodestruction de l’identité si on ne convoque pas l’histoire. Comment sortir indemne lorsque votre bourreau a durant des siècles justifié l’esclavage en se servant de la bible ? D’ailleurs, n’est-ce pas l’église qui, face au calvaire des autochtones des Amériques, accepte que l’on déporte des Africains ? Que n’a t’on pas fait subir comme sévices aux Africains déportés et à leurs descendants ! Tant de violence exercée ( j’aimerai tant l’évoquer plus longuement car ma passion est l’histoire). Notre estime de soi fut écrabouillée durant la colonisation et vous voudriez qu’il n’y ait aucune séquelle ? Impossible !!!
On nous a dit que nous étions laids ! Et nous l’avons cru.
Il a fallu que le panafricanisme ( né dans les Caraïbes de l’extraordinaire volonté de liberté) commence à valoriser nos peuples pour que l’Afrique se voit autrement !
Souvenez-vous du slogan « BLACK IS BEAUTIFUL » et la chanson de James Brown « Said it loud, i’am black and proud”. En relevant la tête, nos références étaient blanches.
Où que vous soyez dans le monde, les peuples opprimés ont toujours pris pour modèle leurs dominants, leurs chasseurs. C’est triste mais c’est humain. On s’identifie à ce qui brille et jamais à une image négative et de défaite. Nous devons reconstruire nos imaginaires pour enfin aborder et trouver des solutions à nos contradictions et à la négation de nos êtres. La problématique de la dépigmentation n’est pas qu’une affaire de femmes mais de regards croisés. L’homme souhaitant une femme plus claire de peau n’a qu’à trouver une femme à la pigmentation plus métissée et inversement. L’amour n’est pas une question de couleur de peau. Dans ma chanson « Brûlant et violent » ( « Ma dignité » ), sortie en 2000, je dis
« De la peau claire, à la peau la plus foncée, mon pays est toujours miné par tous ces préjugés ! Ma dignité ne sera jamais souillée, ma liberté tu ne pourras pas l’entraver, ma vérité est celle d’un peuple opprimé, ma destinée tu ne pourra pas la changer ».
Sensibiliser est primordial. Mais l’arme la plus puissante et la plus durable est d’enseigner à nos enfants qu’ils sont beaux et dignes. Qu’ils ont de la valeur. Il est urgent d’avoir de sublimes représentations afros et dans tous les domaines. Il faut que les législateurs en Afrique interdisent ces produits responsables dans beaucoup de cas de cancer de la peau. Dès l’école, l’enfant doit être sensibilisé avec des images et mots forts « SE DEPIGMENTER C’EST ASSASSINER SA DIGNITÉ ET AVEC PRÉMÉDITATION ! »
Et puis, la dépigmentation pose un problème de santé publique.
Si c’était un phénomène de mode, il ne serait pas ancré dans les comportements de femmes et d’hommes depuis si longtemps.
C’est un rejet inconscient de l’être afro.
Mais la personne ne le vit pas ainsi car dans son histoire, son identité a toujours été écrabouillée. Donc, pour exister, il faut tenter d’apparaître plus métisse.
À une époque en France, certaines femmes africaines, à la peau dépigmentée, voulaient passer pour des antillaises, oubliant qu’il y a aussi des femmes foncées de peau aux Antilles. Chez moi en Guadeloupe, personne n’aurait l’idée de se dépigmenter la peau.
Cela dit, on peut entendre l’explication de la préférence. Pour autant, aller jusqu’à se décaper, traduit autre chose, un dysfonctionnement dans le rapport à soi.
La dépigmentation détruit l’âme des afros.
Cet acte de dépigmentation s’ajoute aux nombreuses défaites de nos peuples et dans tous les domaines. Pensez-vous vraiment que les occidentaux ne savent pas l’envie de certaines et certains Africains d’avoir la peau plus claire ? Pensez-vous qu’il ne savent pas que nos femmes portent des perruques imitant les cheveux des occidentales et des Indiennes ?
Beaucoup se moquent et analysent de tels négations de ses critères de beauté pour adopter ceux des peuples qui les ont dominés et les dominent encore par l’hégémonie médiatique et culturelle.
Volontairement je n’aborde pas d’autres aspects témoignant des défaites passées et des soumissions présentes.
Ce n’est pas un plus ! Mais il est tant que ce ne soit plus un moins ! Et ce n’est pas la responsabilité des autres mais la nôtre. Nous n’avons plus le temps de nous plaindre des autres. Arrêtons la schizophrénie et l’infantilisation.
Des ignorants qui ignorent qu’ils le sont. Ils ont essayé de me rabaisser en pensant me dévaloriser en évoquant ma couleur. C’est le genre d’argument employé par les racistes. Problème pour eux, pour moi, c’est gens sont des idiots et il est tellement facile de les mettre en déroute. Donc, ils m’amusent et leurs mots n’ont aucun impact sur moi.
Je n’ai pas le temps de soigner les racistes. Je n’ai qu’une vie et elle est précieuse. Le racisme est une pathologie. Et je n’ai pas les diplômes pour trouver un protocole de guérison.
Toutes initiatives pour réparer, reconstruire nos sociétés malades sont indispensables.
L’éducation pour un changement de mentalité est l’axe primordial pour lequel nous devrions mobiliser toutes nos forces intellectuelles et mobiliser les moyens financiers et logistiques pour y parvenir.
Je ne le vis pas comme étant la terre de mes ancêtres. Je le vis comme étant ma terre. Mon test ADN révèle que je suis à 90 % d’Afrique. Pour un Antillais, c’est énorme !
Que chacun comprenne que nous n’avons qu’une vie, dans laquelle nous sommes conscients de nos actes. Je ne m’interroge jamais au sujet de l’au-delà; demain peut attendre. La vie nous oblige à être des femmes et des hommes rationnels. Nous avons un monde à construire. Un monde qui nous ressemble et nous rassemble.
« Mon âme ma flamme sont blessées, Mon sang mes larmes ont coulé pour l’égalité ». Extrait de ma chanson « Cœur amoureux » en duo avec Kaysha.
Propos recueillis par Alain Mouaka; Ceo de Pensées Noires Magazine.
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