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La Chine, une opportunité pour l’Afrique

Les financements de la Chine représentent “une opportunité extraordinaire” pour l’Afrique, a jugé Céline Allard, chef de la division des études régionale du département Afrique du Fonds monétaire international (FMI).

Céline Allard avait accordé une interview à Xinhua

La Chine est maintenant un “partenaire essentiel pour l’Afrique”. C’est le premier partenaire économique à ce stade pour les pays d’Afrique subsaharienne, aussi un fournisseur important de financements pour la région, a souligné l’économiste française, en visite mardi à Yaoundé pour la présentation du Rapport 2016 sur les perspectives économiques régionales en Afrique subsaharienne.

“Effectivement, a-t-elle observé, à Johannesburg en décembre 2015 au cours de la réunion du FOCAC [Forum sur la coopération sino-africaine], la Chine s’est engagée à débloquer sur les trois prochaines années 60 milliards de dollars de financements pour la région, plus qu’un doublement par rapport aux 25 milliards qui avaient été débloqués en 2012”.

Ce financement porte sur un programme de dix domaines d’intervention, allant des infrastructures à l’agriculture en passant par l’énergie, l’environnement, la paix et la sécurité, etc. L’objectif est de renforcer la coopération entre la Chine et ses partenaires africains.

“Indéniablement cela représente une opportunité extraordinaire pour les pays d’Afrique subsaharienne. Maintenant, quelle est la meilleure manière de gérer ces opportunités ? Je pense qu’en fait nos recommandations s’appliquent à la fois aux financements qui viennent de la Chine et à tous les autres financements”, fait savoir Mme Allard.

Il s’agit, explique-t-elle, de faire en sorte que les projets relatifs à ces financements soient sélectionnés de manière à ce qu’ils aient le meilleur rendement à la fois économique et social.

“Donc, précise la responsable du FMI, il faut travailler à la fois sur le processus de sélection qui doit être très sérieux et aussi sur le processus d’implémentation de ces projets. Et en ce sens une bonne gestion de la dette publique est un élément essentiel”.

“Dans un deuxième lieu, ajoute-t-elle, plus généralement ce qui est très important, c’est de veiller, quand les pays s’engagent dans ces grands projets d’investissement, à ce que cela ne mette pas en danger la soutenabilité de la dette publique, puisqu’en fait ces projets doivent un jour être remboursés avec la croissance qu’ont générée ces investissements”.

Dans son nouveau Rapport sur les perspectives économiques régionales en Afrique subsaharienne, le FMI s’inquiète de la décélération de la croissance de cette région, de l’ordre de 1,4%, soit le niveau le plus bas depuis plus de 20 ans, alors que le début de la décennie 2010 avait été marqué par des performances appréciables d’environ 5% en moyenne annuelle.

Parmi les facteurs évoqués pour expliquer cette difficile conjoncture, figure la chute des prix des matières premières dont le pétrole où un léger rebond a été enregistré après une décision prise par les pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) à Alger (Algérie) pour un accord sur le gel de leur production en vue de permettre une remontée des cours.

A la question de savoir si une amélioration des perspectives économiques est envisageable pour l’Afrique, Céline Allard répond : “C’est vrai, les pays de l’OPEP ont commencé à en parler et envisagent de réduire l’offre de pétrole. Ceci dit, ce que je voudrais souligner, c’est qu’on a aussi un développement plus structurel avec une augmentation de l’offre, en particulier en Amérique du Nord qui maintient l’offre très élevée, avec une demande aussi qui est faible”.

“Nous prévoyons en effet une situation où les prix des matières premières ne vont pas remonter au niveau qu’ils ont connu encore au début de la décennie 2010. C’est pour cela que nous appelons les pays d’Afrique subsaharienne les plus touchés à réagir de manière très urgente”, poursuit-elle.

Pour pouvoir atténuer les effets de la crise, la plupart des pays africains ont entrepris des réformes structurelles et économiques.

Mais de l’avis de cette économiste, “ces réactions étaient en général tardives et incomplètes. Et donc de ce fait ce à quoi on assiste actuellement, c’est du fait de ce retard de réactions un entérinement du ralentissement de la croissance qui s’étale et maintenant qui affecte toutes les sources de demande des pays, l’intégralité de l’économie”.

Par exemple, “on le voit au Nigeria où c’est non seulement les secteurs qui sont reliés au pétrole, mais aussi le secteur manufacturier, la construction, les services qui commencent à être affectés, avec le ralentissement que l’on sait. Donc, ces politiques sont efficaces. Encore faut-il qu’elles soient mises en place de manière urgente”.

Pour le chef de la division des études du département Afrique du FMI, “c’est pour cela que nous appelons à une réaction urgente de la mise en place de mesures qui se renforcent les unes les autres. Dans un premier lieu, laisser les taux de change absorber complètement les pressions extérieures dans les pays qui ne sont pas en union monétaire”.

Une autre recommandation préconise de “resserrer la politique monétaire là où l’inflation ne puisse augmenter et en dernier lieu rétablir les équilibres budgétaires qui ont été beaucoup mis à mal par la baisse des prix des matières premières, tout en mobilisant mieux les recettes non pétrolières et non reliées aux matières premières et en préservant bien sûr les dépenses qui sont ciblées pour les fragments de la population les plus vulnérables”.

Du Sahel à la zone du lac Tchad jusqu’à la Corne de l’Afrique, le terrorisme pose un défi majeur à relever par les pays du continent.

Concernant le soutien attendu de la communauté internationale pour lutter contre ce phénomène, l’économiste française déclare qu’au FMI “nous sommes tout à fait conscients que le terrorisme représente pour les pays qui sont touchés un défi très important, en termes de pertes humaines bien sûr, mais aussi en termes de leur impact économique, de l’incertitude que cela crée en termes de production agricole ou d’investissements”.

Avec les pays touchés, “nous discutons toujours, précise-t-elle, de la possibilité de dégager des marges de manœuvre potentielles pour faire face au niveau budgétaire aux dépenses supplémentaires que ce défi implique et voire augmenter notre apport financier quand cela est nécessaire”.

“Par exemple dans des pays où nous avons un soutien financier comme le Mali, le Niger ou le Tchad, ce sont des discussions que nous avons de manière très forte avec les autorités”, indique-t-elle.

Nouroudine Akinocho

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