Affaires, Industries et Entrepreneuriat en Afrique face aux barrières mentales parfois créées par les religions

Il est fort légitime de s’interroger sur l’impact de la religion sur le développement d’une nation. En Afrique, l’on assiste à un foisonnement de divers mouvements religieux dont les courants de pensée impactent indubitablement l’activité économique.

Cet essai se veut une contribution à la prise de conscience de barrières mentales créées de toute pièce par des croyances limitatives adoptées par les pratiquants de ces religions. Ces barrières sont si puissantes qu’elles entretiennent auprès des adeptes une illusion de bien-être qui empêche réellement leur épanouissement.

Lorsqu’on interroge les croyants sur le rôle qu’occupe la religion dans leur vie, immanquablement et presqu’à l’unanimité, tous répondent que la religion est là pour permettre aux hommes de servir Dieu. Cependant, pour servir Dieu devrait-on nécessairement appartenir à une religion ? Analysons cette question sous un angle économique.

Nous savons tous que les industriels sont les acteurs de l’économie et le but de leur action reste et demeure le profit. Peut-on alors être un chrétien ou un musulman en étant pleinement un industriel ou un homme d’affaires ? Peut-on suivre scrupuleusement les préceptes religieux tout en revêtant la casquette d’industriel, si solidement vissée sur les têtes par la recherche effrénée du profit ? Ces questions très banales sont pourtant importantes à poser.

“Les Africains ont choisi le miracle et la délivrance comme solution aux problèmes de la société.”

Si nous voulons nous développer dans les affaires, il est important de nous libérer des chaînes mentales qui inhibent notre réflexion, installent en nous la peur, construisent et entretiennent les préjugés. Ces chaînes, fruits des religions ou des traditions, sont très souvent à l’origine de nos échecs. Étant donné que leurs effets ne sont pas directs, il est difficile pour les victimes de s’en rendre compte. Une économie n’est pas seulement le fruit du travail, elle est aussi le résultat de la morale collective qui guide les acteurs de ce travail. Et cette morale peut être, selon son interprétation, en défaveur des résultats escomptés. C’est la raison pour laquelle ceux qui se démarquent dans la société sont souvent traités de sorciers, sectaires, pratiquants, agents du Diable… L’explication est que la pensée commune ne donne pas place à l’utilisation du libre arbitre comme guide de nos choix.

Si les reliques, objets et gadgets (croix, communion, huiles, parfum, vêtements, “livres saints”, eau…) utilisés dans les religions sont le fruit de l’industrie, il me semble important de rappeler que la religion a un but plus économique que liturgique. Le mensonge utilisé par les leaders religieux pour vendre ces produits doit nous amener à questionner l’éthique religieuse. Aujourd’hui notre économie est prisonnière des chiffres et ne jure que sur la croissance, laquelle pour certains, est une logique sûrement viciée. Notre course devient frénétique s’il faut parler de l’éthique. Mais l’éthique industrielle et l’éthique religieuse peuvent-elles cohabiter ?

Il y a de cela quelques mois, le père Jérôme HAUSWIRTH de son vrai nom Jérôme JEAN, Curé « in solidum » des paroisses de Choëx-Monthey-Collombey et Muraz dans la commune suisse du canton du Valais, située dans le district de Monthey sur la rive gauche du Rhône, a rajouté après son homélie du 8ème dimanche de l’année, après lecture de l’Évangile de Mathieu 6:24 dans lequel il est dit : “Nul ne peut servir deux maîtres à la fois”, car, ou il haïra l’un, et aimera l’autre; ou il s’attachera à l’un, et méprisera l’autre. “Vous ne pouvez servir Dieu et Mamon” en tentant de donner une explication à ce passage de la bible qui est clair sur Dieu et l’argent. Dans ses propos, le Curé disait : « Le service détermine l’attitude due au Maître. La loyauté interdit de tenir deux attitudes. Nous devons faire un choix et fixer la priorité. Qui est premier ? Dieu ou l’Argent ? L’un ou l’autre. Choisir l’un, exclut nécessairement l’autre. Dieu et l’Argent n’étant pas du même ordre, servir l’un empêche de pouvoir servir l’autre. Dieu attend donc de nous un amour entier, un amour de préférence. Notre cœur bat pour aimer, pour aimer Dieu et le prochain. Son concurrent le plus direct, c’est l’argent, parce qu’il donne accès à l’avoir, au pouvoir et à la gloire selon le monde. Dans l’évangile de ce jour, Jésus critique notre relation à l’argent. Car de serviteur, ou plutôt de moyen d’échange de biens et de services, il peut facilement devenir une fin en soi, un absolu, c’est-à-dire une idole. Et alors l’argent fait obstacle à la vie spirituelle. »

La conclusion de cette citation du Curé est claire, « L’argent fait obstacle à la vie spirituelle ».

Cette affirmation qui est commune aux croyants chrétiens après lecture de ce passage biblique est même à l’origine du mépris du bien matériel que font les chrétiens Africains. Le but de l’industriel étant de faire du profit, comment peut-on mépriser l’argent et vouloir faire des affaires ? Comment peut-on mettre la priorité sur Dieu et devenir industriel lorsqu’on connaît les “mensonges et crimes” de l’industrie ? La priorité d’un homme d’affaires tout comme un industriel est avant tout sur ses projets et non sur un quelconque Dieu. Accepter alors de faire les affaires, c’est accepter de mettre Dieu au second rang, ou de l’exclure définitivement.

LES RELIGIONS POSENT-ELLES UN PROBLEME AU DEVELOPPEMENT DES AFFAIRES EN AFRIQUE ?
Poser la question ou tenter d’y répondre par “oui” ou par “non”, c’est déjà admettre l’hypothèse d’une possibilité de l’être, et qui peut déjà nous amener à inscrire les religions sur la liste des maux de l’humanité, tout comme le nucléaire, la pollution ou le capitalisme. Si nous pouvons justifier notre inquiétude, nous questionnerons la naissance quotidienne des religions et églises qui proposent chacune un discours exclusiviste dont personne ne peut contrôler ni verifier le contenu du message. Ce mal qui de plus en plus devient inquiétant vient ainsi couronner et consolider les barrières mentales déjà installées chez l’Africain à travers une éducation pernicieuse et un système politique passif qui encourage la médiocrité et prime la mbêtise.

“Les nations les plus équipées du monde font recours au mensonge pour justifier leur ingérence, de même que les mythes et fables que racontent les religions ne sont que d’habiles constructions à prétention économique.”

 

Nicolas Machiavel, dans son livre à succès « Le Prince » fit du mensonge et de la dissimulation une grande nécessité en politique. Mais avant lui, les religions tout comme les politiques avaient déjà compris la leçon, et la tradition continue.

Il revient alors à l’industriel et homme d’affaire africain de se libérer de ses barrières mentales. Et surtout il est très important de ne pas se voiler la face, d’ouvrir les yeux, d’oser se regarder et oser prendre conscience même si cela peut parfois être difficile. Les religions ont permis aux sociétés intelligentes de contrôler le monde. Grace à elles, l’esclavage a été justifié car “prescrit par Dieu”.

Du point de vue de la religion, l’industrie ou les affaires sont une organisation criminelle, qui vit du mensonge et de la manipulation. Les produits issus de l’industrie sont à 70% faux ou les idées et perceptions conçues autour des produits ne sont en rien proches du contenu de ce produit. Le consommateur vit dans l’illusion et la manipulation, car victime des publicités mensongères et des codes chimiques non maîtrisés. Les grands centres de recherche du monde sont manipulés par les industriels. Or, la croyance nous demande de rester dans la « Vérité » ce qui rend difficile de penser qu’on peut produire de l’amidon de maïs et dire au consommateur que c’est du lait en poudre, comme c’est le cas actuellement.

Tout comme les affaires, personne ne dit la « Vérité », surtout si elle fera obstacle au gain. L’habilité d’un homme d’affaires est contre la foi religieuse et contre la morale collective d’une société à forte dominance chrétienne ou musulmane. Or, l’église elle-même est le résultat d’un calcul affairiste bien élaboré qui profite aux leaders. Les pasteurs, prêtres, imams et autres gourous sont de vrais affairistes qui peuvent poser la main sur une bouteille d’eau, produit de l’industrie, et faire croire aux fidèles que cette eau est déjà bénite et peut guérir tous les maux. On se demande ainsi si l’organisation religieuse n’est pas d’abord une organisation clientèle entretenue par l’idée d’un Dieu. Mais quel leader religieux dira à ses fidèles que l’industrie est une « criminalité » ? Et si l’église condamne « le crime », comment pouvons-nous alors respecter ses préceptes et accepter de vendre des produits toxiques aux humains, « aux enfants de Dieu » ?

Par exemple, la cellulose codé E466 est un résidus de la pâte de bois que l’on retrouve dans l’industrie agro-alimentaire. En fait, la cellulose améliore la texture des aliments transformés. Du coup, les géants de l’alimentaire s’en donnent à cœur joie. C’est avec plaisir qu’ils utilisent de la cellulose, et toujours plus de cellulose. En effet, pour eux, c’est l’ingrédient parfait pour remplacer des ingrédients vieillots et ringards, tels que la farine et l’huile végétale. C’est logique, étant donné que le prix de la cellulose est 30 % moins cher que les ingrédients qu’elle remplace.
L’industriel l’utilise en dépit de ses conséquences sur la santé, puisque son but c’est le profit. L’industriel africain chrétien sera-t-il capable d’un tel « crime » sur la santé des « enfants de Dieu » ? Non, à moins que la religion soit pour lui un cache-sexe.

L’universitaire éthicien Michel Dion dans son livre intitulé « L’éthique de l’entreprise » paru en 2007 aux éditions Fides admet que le mensonge fait partie intégrante des affaires et ne peut être considéré comme un crime. Il va loin en nous disant « dire le contraire ou différemment de ce qui est objectivement vrai »’. Or, quand nous allons revenir à la croyance religieuse, le mot « vérité » sera opposé au mot « mensonge » sans questionnement, et les adeptes le transporteront jusqu’aux affaires tout en oubliant que les mots changent de valeurs selon les cadres.

Un homme d’affaires se doit d’être libre mentalement, il ne doit ni être influencé ni être orienté par des croyances. Il sait ce qu’il veut et se bat pour l’obtenir, même si cela ne doit pas l’être à tout prix. Les croyants s’ils devraient se lancer dans les affaires, devraient d’abord laisser la croyance car il n’est pas de la volonté de Dieu que de dire « nous avons le meilleur produit sur le marché » alors qu’on sait intérieurement que c’est du mensonge.

Si nous devons parler de l’entrepreneuriat en Afrique, de l’industrialisation et des affaires, et que nous voulons tous que les jeunes s’y mettent, il est important de connaître l’ensemble des obstacles qui minent notre société.

 

N’étant pas croyant, je continue de penser que les religieux qui continuent au 21ème siècle de parler des piliers des religions tout en demandant aux fidèles de les respecter sont aussi, comme les impérialistes, coupables de sous-développement en Afrique. Les hommes doivent se sentir libres, libres physiquement, moralement, mentalement et ceci requiert le rejet catégorique des dogmes qui créent des barrières mentales chez les jeunes africains.

Epilogue :
L’éthique des affaires est contre l’éthique des religions, ce qui veut dire que, fondamentalement, les religions sont contre les affaires, même si les leaders religieux ne peuvent le dire ouvertement, ou du moins ce qui s’enseigne entre les lignes. Un homme d’affaire religieux ne peut clamer qu’il vit dans la « vérité » religieuse car les deux ne sont pas conciliables. Alors, si nous voulons faire des affaires et développer l’industrie, nous devons nous livrer à la loi du secteur pour faire du profit. Le consommateur est manipulé, et l’industriel est le manipulateur. Personne ne peut échapper à cette loi, à cette logique.

Recevez les ondes positives, bénédictions et protection de nos ancêtres en ce moment où nous traversons une période de crise plurielle.
On ne peut pas remplacer la paresse par la prière et espérer changer les choses.

Par FOTSING NZODJOU

Fotsing Nzodjou, Ecrivain, coordonnateur du Club Afrique Vision et directeur de la PANAFRICAN ACADEMY-FT, APEAI (académie panafricaine de l’entrepreneuriat, des affaires et de l’industrie) une école de stratégie basée à Douala, pour les jeunes entrepreneurs africains.
Bandjoun le 21 juillet 2018.
Email : fotsingnzodjou@gmail.com
Tel/WhatsApp : 00237 694 04 13 13

 

Aucune vérité n’est supérieure à celle dite dans le sous-bois autour du rocher sacré de NEPÊH LONTHÛ à Batchoum au royaume Bamendjou

Bibliographie
Serge Goldman. Les croyances sont-elles un problème?
Michel Dion. L’éthique de l’entreprise (Fides, 2007)
Les plus gros mensonges de l’industrie agro-alimentaire. comment-economiser.fr

Essenam K²

Journaliste Web

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